»á¼Æ¿¼ÓÑ ·¢±íÓÚ 2012-8-16 14:33:43

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¡¡¡¡Le souper ¨¤ peine achev¨¦£¬ comme on ¨¦tait bris¨¦ de fatigue£¬ on se coucha.
¡¡¡¡Cependant Loiseau£¬ qui avait observ¨¦ les choses£¬ fit mettre au lit son ¨¦pouse£¬ puis colla tant£¿t son oreille et tant£¿t son oeil au trou de la serrure£¬ pour tacher de d¨¦couvrir ce qu'il appelait £º "les myst¨¨res du corridor".
¡¡¡¡Au bout d'une heure environ£¬ il entendit un fr£¿lement£¬ regarda bien vite£¬ et aper£¿ut Boule de suif qui paraissait plus repl¨¨te encore sous un peignoir de cachemire bleu£¬ bord¨¦ de dentelles blanches. Elle tenait un bougeoir ¨¤ la main et se dirigeait vers le gros num¨¦ro tout au fond du couloir. Mais une porte£¬ ¨¤ c£¿t¨¦£¬ s'entrouvrit£¬ et£¬ quand elle revint au bout de quelques minutes£¬ Cornudet£¬ en bretelles£¬ la suivait. Ils parlaient bas£¬ puis ils s'arr¨ºt¨¨rent. Boule de suif semblait d¨¦fendre l'entr¨¦e de sa chambre avec ¨¦nergie. Loiseau£¬ malheureusement£¬ n'entendait pas les paroles£¬ mais£¬ ¨¤ la fin£¬ comme ils ¨¦levaient la voix£¬ il put en saisir quelques-unes. Cornudet insistait avec vivacit¨¦¡£ Il disait £º "Voyons£¬ vous ¨ºtes b¨ºte£¬ qu'est-ce que £¿a vous fait £¿"
¡¡¡¡Elle avait l'air indign¨¦ et r¨¦pondit £º "Non£¬ mon cher£¬ il y a des moments o¨´ ces choses-l¨¤ ne se font pas £» et puis£¬ ici£¬ ce serait une honte."
¡¡¡¡Il ne comprenait point£¬ sans doute£¬ et demanda pourquoi. Alors elle s'emporta£¬ ¨¦levant encore le ton £º "Pourquoi £¿ Vous ne comprenez pas pourquoi £¿ Quand il y a des Prussiens dans la maison£¬ dans la chambre ¨¤ c£¿t¨¦ peut-¨ºtre £¿"
¡¡¡¡Il se tut. cette pudeur patriotique de catin qui ne se laissait point caresser pr¨¨s de l'ennemi dut r¨¦veiller en son coeur sa dignit¨¦ d¨¦faillante£¬ car£¬ apr¨¨s l'avoir seulement embrass¨¦e£¬ il regagna sa porte ¨¤ pas de loup.
¡¡¡¡Loiseau£¬ tr¨¨s allum¨¦£¬ quitta la serrure£¬ battit un entrechat dans sa chambre£¬ mit son madras£¬ souleva le drap sous lequel gisait la dure carcasse de sa compagne qu'il r¨¦veilla d'un baiser en murmurant £º "M'aimes-tu£¬ ch¨¦rie £¿"
¡¡¡¡Alors toute la maison devint silencieuse. Mais bient£¿t s'¨¦leva quelque part£¬ dans une direction ind¨¦termin¨¦e qui pouvait ¨ºtre la cave aussi bien que le grenier£¬ un ronflement puissant£¬ monotone£¬ r¨¦gulier£¬ un bruit sourd et prolong¨¦£¬ avec des tremblements de chaudi¨¨re sous pression. M. Follenvie dormait.
¡¡¡¡Comme on avait d¨¦cid¨¦ qu'on partirait ¨¤ huit heures le lendemain£¬ tout le monde se trouva dans la cuisine £» mais la voiture£¬ dont la bache avait un toit de neige£¬ se dressait solitaire au milieu de la cour£¬ sans chevaux et sans conducteur. On chercha en vain celui-ci dans les ¨¦curies£¬ dans les fourrages£¬ dans les remises. Alors tous les hommes se r¨¦solurent ¨¤ battre le pays et ils sortirent. Ils se trouv¨¨rent sur la place£¬ avec l'¨¦glise au fond et£¬ des deux c£¿t¨¦s£¬ des maisons basses o¨´ l'on apercevait des soldats prussiens. Le premier qu'ils virent ¨¦pluchait des pommes de terre. Le second£¬ plus loin£¬ lavait la boutique du coiffeur. Un autre£¬ barbu jusqu'aux yeux£¬ embrassait un mioche qui pleurait et le ber£¿ait sur ses genoux pour tacher de l'apaiser £» et les grosses paysannes dont les hommes ¨¦taient ¨¤ "l'arm¨¦e de la guerre"£¬ indiquaient par signes ¨¤ leurs vainqueurs ob¨¦issants le travail qu'il fallait entreprendre £º fendre du bois£¬ tremper la soupe£¬ moudre le caf¨¦ £» un d'eux m¨ºme lavait le linge de son h£¿tesse£¬ une a£¿eule tout impotente.
¡¡¡¡Le comte£¬ ¨¦tonn¨¦£¬ interrogea le bedeau qui sortait du presbyt¨¨re. Le vieux rat d'¨¦glise lui r¨¦pondit £º "Oh £¡ ceux-l¨¤ ne sont pas m¨¦chants £º c'est pas des Prussiens ¨¤ ce qu'on dit. Ils sont de plus loin£¬ je ne sais pas bien d'o¨´ £» et ils ont tous laiss¨¦ une femme et des enfants au pays £» £¿a ne les amuse pas£¬ la guerre£¬ allez £¡ Je suis s£¿r qu'on pleure bien aussi l¨¤-bas apr¨¨s les hommes £» et £¿a fournira une fameuse mis¨¨re chez eux comme chez nous. Ici£¬ encore£¬ on n'est pas trop malheureux pour le moment£¬ parce qu'ils ne font pas de mal et qu'ils travaillent comme s'ils ¨¦taient dans leurs maisons. Voyez-vous£¬ Monsieur£¬ entre pauvres gens£¬ faut bien qu'on s'aide¡­¡­ C'est les grands qui font la guerre."
¡¡¡¡Cornudet£¬ indign¨¦ de l'entente cordiale ¨¦tablie entre les vainqueurs et les vaincus£¬ se retira£¬ pr¨¦f¨¦rant s'enfermer dans 1'auberge. Loiseau eut un mot pour rire £º "Ils repeuplent." M. Carr¨¦-Lamadon eut un mot grave £º "Ils r¨¦parent." Mais on ne trouvait pas le cocher. A la fin on le d¨¦couvrit dans le caf¨¦ du village attabl¨¦ fraternellement avec l'ordonnance de l'officier. Le comte l'interpella £º "Ne vous avait-on pas donn¨¦ l'ordre d'atteler pour huit heures £¿
¡¡¡¡¡ª¡ª Ah bien oui£¬ mais on m'en a donn¨¦ un autre depuis.
¡¡¡¡¡ª¡ª Lequel £¿
¡¡¡¡¡ª¡ª De ne pas atteler du tout.
¡¡¡¡¡ª¡ª Qui vous a donn¨¦ cet ordre £¿
¡¡¡¡¡ª¡ª Ma foi £¡ le commandant prussien.
¡¡¡¡¡ª¡ª Pourquoi £¿
¡¡¡¡¡ª¡ª Je n'en sais rien. Allez lui demander. On me d¨¦fend d'atteler£¬ moi je n'attelle pas. Voil¨¤¡£
¡¡¡¡¡ª¡ª C'est lui-m¨ºme qui vous a dit cela £¿
¡¡¡¡¡ª¡ª Non£¬ Monsieur £º c'est l'aubergiste qui m'a donn¨¦ l'ordre de sa part.
¡¡¡¡¡ª¡ª Quand £¿a £¿
¡¡¡¡¡ª¡ª Hier soir£¬ comme j'allais me coucher."
¡¡¡¡Les trois hommes rentr¨¨rent fort inquiets.
¡¡¡¡On demanda M. Follenvie£¬ mais la servante r¨¦pondit que Monsieur£¬ ¨¤ cause de son asthme£¬ ne se levait jamais avant dix heures. Il avait m¨ºme formellement d¨¦fendu de le r¨¦veiller plus t£¿t£¬ except¨¦ en cas d'incendie.
¡¡¡¡On voulut voir l'officier£¬ mais cela ¨¦tait impossible absolument£¬ bien qu'il logeat dans l'auberge. M. Follenvie seul ¨¦tait autoris¨¦ ¨¤ lui parler pour les affaires civiles. Alors on attendit. Les femmes remont¨¨rent dans leurs chambres£¬ et des futilit¨¦s les occup¨¨rent.
¡¡¡¡Cornudet s'installa sous la haute chemin¨¦e de la cuisine£¬ o¨´ flambait un grand feu. Il se fit apporter l¨¤ une des petites tables du caf¨¦£¬ une canette£¬ et il tira sa pipe qui jouissait parmi les d¨¦mocrates d'une consid¨¦ration presque ¨¦gale ¨¤ la sienne£¬ comme si elle avait servi la patrie en servant ¨¤ Cornudet. C'¨¦tait une superbe pipe en ¨¦cume admirablement culott¨¦e£¬ aussi noire que les dents de son ma£¿tre£¬ mais parfum¨¦e£¬ recourb¨¦e£¬ luisante£¬ famili¨¨re ¨¤ sa main£¬ et compl¨¦tant sa physionomie. Et il demeura immobile£¬ les yeux tant£¿t fix¨¦s sur la flamme du foyer£¬ tant£¿t sur la mousse qui couronnait sa chope £» et chaque fois qu'il avait bu£¬ il passait d'un air satisfait ses longs doigts maigres dans ses longs cheveux gras£¬ pendant qu'il humait sa moustache frang¨¦e d'¨¦cume.
¡¡¡¡Loiseau£¬ sous pr¨¦texte de se d¨¦gourdir les jambes£¬ alla placer du vin aux d¨¦bitants du pays. Le comte et le manufacturier se mirent ¨¤ causer politique. Ils pr¨¦voyaient l'avenir de la France. L'un croyait aux d'Orl¨¦ans£¬ l'autre ¨¤ un sauveur inconnu£¬ un h¨¦ros qui se r¨¦v¨¦lerait quand tout serait d¨¦sesp¨¦r¨¦ £º un Du Guesclin£¬ une Jeanne d'Arc peut-¨ºtre £¿ ou un autre Napol¨¦on Ier £¿ Ah £¡ si le prince imp¨¦rial n'¨¦tait pas si jeune £¡ Cornudet£¬ les ¨¦coutant£¬ souriait en homme qui sait le mot des destin¨¦es. Sa pipe embaumait la cuisine.
Ò³: [1]
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