</p> A la nuit tombante ils s'égarèrent et le comte se retrouva seul, dans une vallée sauvage où il décida de passer la nuit dans les branches d'un gros orme, au-dessus d'un puits abandonné. Il allait s'endormir lorsque, à la lueur de la lune, il aper?ut une forme humaine descendant la vallée: c'était la gardienne d'oies. Elle s'approcha du puits, ?ta les nattes grises qui couvraient ses cheveux et le masque de peau qui cachait son visage, puis, se penchant sur l'eau, elle mouilla ses mains, ses bras et sa figure. Alors elle apparut, belle comme le jour, avec son teint de lis, ses yeux clairs et le manteau d'or de ses cheveux la couvrant tout entière.& L8 F) y! e3 e* X. }
Si grande était la stupéfaction du comte qu'il ne pouvait en croire ses yeux et, écartant les feuilles, il se pencha pour mieux voir. Mais son geste fit craquer une branche et, prompte comme une biche effarouchée, la jeune fille remit son masque et disparut à travers les buissons, tandis qu'un nuage venait voiler la lune et couvrir sa retraite.- P. A) W- z/ Q: R) A, @
Le comte descendit de l'arbre et s'élan?a à la poursuite de la si belle inconnue. Il ne put la rejoindre, mais sa course le conduisit auprès de l'endroit où s'étaient arrêtés le roi et la reine et, les éveillant, il leur raconta ce qu'il venait de voir. A son récit, l'émotion de la reine s'accrut encore. Incapable d'attendre que le jour se lève, elle décida le roi à reprendre aussit?t leurs recherches, et tous trois marchèrent longtemps à la clarté des étoiles. Arrivés enfin, au sommet de la montagne, ils aper?urent une lumière. La sorcière veillait encore, guettant les arrivants, et au premier coup qu'ils frappèrent, la porte s'ouvrit.
/ D1 u; p, `& Q/ D/ D -- Que désirez-vous? dit la vieille, hargneuse.
" N, y$ |3 ~9 h. p! l -- Madame, lui dit la reine, d'où tenez-vous cette perle?' L8 }/ |9 [2 N6 j+ d8 \- U, B9 r2 Y
-- C'est une larme que pleurait une pauvre fille, chassée par ses parents.
0 ~8 d' f3 s( E0 n& c9 y -- Ma fille aussi pleurait des perles, dit la reine.
1 e1 c4 S7 M6 _% a( b6 A( f7 _ -- Et moi, je l'ai chassée, dit le roi.
' v9 [* d" r: O: h+ d -- Si ma fille est encore en vie et si vous savez où elle est, s'écria la reine, dites-le-moi, par pitié.
" ?+ k4 G k& \) U# T- m. k Mais la sorcière refusa de répondre et lui demanda quel crime avait pu commettre son enfant pour qu'elle soit chassée.* ]0 _/ A" b; J+ a& [
''J'avais trois filles, commen?a la reine, que j'aimais tendrement, mais la plus jeune était ma préférée.''% a/ D$ I8 |0 a. F" f& J- |
-- Elle était la mienne aussi, reprit le roi, mais un jour, j'ai voulu savoir à quel point mes filles m'aimaient. L'a?née, qui est coquette, m'a répondu qu'elle m'aimait plus que sa plus belle robe. La seconde, qui est coquette aussi, m'a dit qu'elle me préférait à ses plus beaux bijoux. La troisième m'a répondu: ''Je vous aime comme j'aime le sel.'' Alors je l'ai chassée et j'ai partagé mon royaume entre les deux autres., K" M" U, }& |+ A
-- Ah! Ah! Ah! s'écria la sorcière. Les aliments sans sel n'ont pas de go?t. Votre fille voulait dire que, sans vous, la vie n'aurait plus de saveur, et vous l'avez chassée. Ah! Ah! Ah!8 a1 ?; R+ l1 z2 e7 F' j
-- Hélas! dit la reine. Nous l'avons compris trop tard! Nous avons fait en vain fouiller la forêt et la montagne. Sans doute les bêtes sauvages ont dévoré notre pauvre fille.# q) a$ u7 x/ Y: ]' m
-- Sans doute, dit la sorcière et, se levant, elle ouvrit une porte et appela: ''Viens, ma fille.''5 K/ f* a5 i3 S6 W: F
Ce ne fut pas la gardienne d'oies qui entra, ou plut?t ce fut elle, sous la forme de la magnifique princesse que le comte avait aper?ue au bord du puits. Elle se jeta en pleurant de joie dans les bras de ses parents, et ses larmes étaient des perles. Sans mot dire, le comte observait la scène, puis, détachant avec effort son regard de la belle princesse, il voulut implorer la pitié de la sorcière... Mais il ne reconnut plus celle-ci.2 {/ m2 ] @1 a0 ]8 ?8 d2 h
Un sourire de joie la transfigurait et il comprit que cette vieille femme si odieuse n'était pas une sorcière, mais plut?t une bonne fée déguisée.
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( R/ w4 [+ S7 m; y ''Puisque vous avez déshérité votre enfant, dit-elle intervenant alors, et puisque, depuis trois ans, je la considère comme ma fille, avant de vous la rendre laissez-moi la doter. Pour fortune, je lui donne ce monceau de perles, qui sont toutes les larmes qu'elle a versé sur vous. Pour demeure, je lui offre cette chaumière où elle a vécu loin de tout danger, sans autre chagrin que votre absence, et pour époux je lui suggère de prendre ce jeune comte dont le coeur est bon, puisqu'il a tour à tour secouru une vieille femme ployant sous sa charge et aussi des parents accablés par le chagrin.'' |